mardi 26 février 2013

DESS 2 : Parlons SEXE!


Éros et Psychée
Photo trouvée ici

C'est un sujet qui revient souvent sur les forums de discussions, mais dont on parle rarement avec nos amis et nos familles.  Allez savoir pourquoi ;o)

Dans mon essai, j'ai décidé d'aborder le côté "vie sexuelle" du couple suite à l'annonce de l'infertilité et pendant les traitements d'infertilité.  Pour moi, il y a vraiment une distinction à faire entre "pendant l'investigation et à l'annonce" et "pendant les traitements". Les auteurs semblent partager mon point de vue.

Sans entrer dans les détails de ma vie sexuelle, je dois avouer que j'avais observé, dans mon couple, une modification de la signification de la sexualité.  Les relations sexuelles sont devenues, au fil des années, un acte de reproduction et non plus un acte d'amour et de tendresse.  Surtout pendant la période "hormones seulement" et la période "insémination".  Le thermomètre, les test d'ovu, l'application "Fertility Friend" et les recommandations du médecins ne nous aidaient en rien dans cette descente!

Une fois en FIV, nous savions que ça ne servait à rien de compter et de faire l'acte sur les journées optimales du calendrier. Au diable le thermomètre et l'application "Fertility Friend", hors traitement on le faisait quand ça nous tentait!  Alors, hormis pour l'abstinence nécessaire avant la ponction (pour un échantillon optimale), puis post-ponction (pour diminuer les risques d'infection), puis post-transfert (pour optimiser nos chances, même si personne ne nous l'avait recommandé), les relations sexuelles ont retrouvé leur signification d'antan...  Ou presque!  Pas facile d'effacer 3 ans et demi de PMA.

Mais qu'en disent les spécialistes et les chercheurs?

Sommes-nous normaux?

Et bien oui, mesdames et messieurs!

Pour la femme, l'idée de la procréation est très présente dans les rapports sexuels. Les auteurs s'entendent pour dire que "faire un enfant" devient une finalité. Il faut dire que depuis son adolescence, on répète à la femme de faire attention, qu'elle pourrait tomber enceinte et qu'il est important de se protéger.  La contraception entretient cette idée de rapport sexuel pour le plaisir et, par le fait même, de rapport sexuel pour faire un enfant lorsque ce dernier est fait sans contraception. Selon les études, la sexualité est mise de côté et la femme se dit souvent « À quoi bon? ».  De mon côté, je dois dire que ce n'est pas la question "À quoi bon?" que j'avais en tête en période post-ovulatoire, mais plutôt la réflexion "Enfin une pause!  Je ne suis pas obligée de le faire!"...

On observerait chez plusieurs femmes :
  • Une diminution du désir
  • Une diminution de la recherche du plaisir et
  • Une absence de la spontanéité
On observerait aussi chez quelques femmes une diminution de leur libido. voire l’installation de troubles sexuels.

Les rapports sexuels deviendraient, pour certaines femmes, un « travail contraignant » dépourvu d’érotisme.
Bien entendu, plusieurs auteurs s'entendent pour dire que les bouffées de chaleur, les troubles de l’humeur, les maux de tête, la prise de poids et son impact sur l’image corporel et les douleurs pelviennes dues à la stimulation des ovaires sont autant de facteurs pouvant affecter la libido de la femme. Ça c'est sans compter sur le fait que certaines hormones affectent directement la libido!

Semblerait que la femme infertile rechercherait, à long terme, la tendresse non génitale.

Ça fait du sens...  à mon avis!

Et du côté des hommes?  Et bien ça dépend!

Lorsque l’infertilité est d'origine masculine, près de 20% des couples rencontreraient des difficultés sexuelles diverses. Pourquoi?  Parce que l'annonce de l’infertilité affecterait la virilité et la masculinité de l'homme. Il y aurait une confusion entre infertilité et impuissance . Déjà à cause des mots employés lors du diagnostic, mais surtout à cause de l'image que notre société de performance entretiendrait sur les hommes ayant plusieurs enfants.

Qu'elle personne infertile n'a pas entendu la remarque "Je te prête mon chum si tu veux!  Il me met enceinte du premier coup!".  Comme si la fertilité ne reposait que sur les épaules de l'homme...  

Un autre exemple? Avez-vous vu le film "Comment prévoir l'imprévisible" ou "What to Expect When You're Expecting"?  Bon, c'est pas du grand cinéma, ni un film ayant pour but d'informer de façon objective et nuancée les différentes façons de faire un enfant et de vivre la maternité.  On s'entend que c'est un film humoristique sur la maternité.  Point! Dans ce film, le père de l'homme qui a mis 2 ans à se reproduire (et qui devait débuter les FIV le cycle suivant), attend lui aussi un enfant.  Vous suivez?  Le père de cet homme se vante d'avoir mis sa conjointe enceinte aussi rapidement compte tenu de son âge (ils n'étaient même pas en essai)...  Son fils lui répond que tout n'est pas une course...  Et son père réplique "Ce n'est pas une course, si tu ne peux pas arriver premier!". Autrement dit, ce n'est pas une course si tu n'as pas les "moyens" de concourir!

C'est dommage, mais c'est la réalité.  Les couples qui conçoivent rapidement (pas tous, par chance!) se vantent souvent de cette capacité...  Surtout du côté masculin!  C'est une réussite pour l'homme. De vrais "starbuck".  J'ai d'ailleurs une amie dont la belle-famille a remis, à monsieur, un t-shirt avec la mention "starbuck" lorsque ce dernier à eu l'assurance que son sperme et ses spermatozoïdes n'étaient pas en cause!   Une preuve de sa capacité et, par amalgame, de sa virilité.  Je reparlerai prochainement de cet amalgame fertilité-masculinité-virilité dans un autre billet.

Mais revenons au sujet...  Au moment de l'annonce du diagnostic d'infertilité masculine :
  • 22% des hommes développeront une dysfonction érectiles modérée ou sévère temporaire (ou non!)
  • 23% développeront une dépression modérée ou sévère et auront un score faible au niveau de l’estime de soi et
  • 50% développeront une éjaculation rapide, de l’anxiété et de l’angoisse de performance. 
Le lien entre anxiété et difficultés sexuelles serait bien plus fort chez l’homme.  Même que certains hommes pourraient être amenés à vouloir retrouver leur identité masculine à travers des aventures extra-conjugales.  Je comprends mieux pourquoi on nous demande un bilan annuel pour les ITS et le VIH.

Pendant les traitements, ce sont les trouble de l’érection et l'anéjaculation qui sont les plus fréquemment observés.  Ceux-ci affectant la performance attendue le jour J.  Par chance, ses hommes ont la possibilité de congeler leur sperme pour ainsi diminuer l'anxiété de performance lors de cette journée si importante.

Finalement, les études précisent que la masturbation nécessaire pendant les traitements d'insémination et de fécondation in vitro est, pour certains hommes, un acte « inconnu » ou allant à l’encontre de leurs croyances.
Pas facile pour les messieurs. 

Et au niveau de couple?

Rien d'étonnant que les études soutiennent que la sexualité du couple est détériorée par l’infertilité et ses traitements. Sans surprise, les auteurs indiquent qu'il y a :
  • Une augmentation des rapports en période ovulatoire et
  • Une diminution de la fréquence et des préliminaires.
Par contre, tous les auteurs ne s'entendent pas sur le sujet.  Quelques études démontrent que la vie sexuelle de la majorité des couples n'est pas dégradée et ne diffère pas de celles couples fertiles.  Généralement, la comparaison est effectuée avec des couples fertiles, avec ou sans enfant, et porte sur la fréquence des rapports en fonction du nombre d'années de vie commune.  Je me questionne sur l'impact que la venue d'un enfant crée sur la vie vie sexuelle du couple.  J'ai un peu l'impression que ces études comparent des pommes et des poires...  J'ai donc tendance à privilégier les études longitudinales.

La bonne nouvelle pour les couples infertiles pour qui les traitements ont réussi, c'est qu'ils auraient une meilleure satisfaction sexuelle que les couples ayant conçu un ou des enfants de façon naturelle (ce qui tend, par le fait même, à appuyer ce que j'expliquais dans le paragraphe précédent!)!

C'est au moins ça de gagné pour nous!

Et vous, vous en pensez quoi?
Est-ce que vous vous reconnaissez?  Des conflits sont-ils apparus dans votre couple à cause d'une "disharmonie" sexuelle?  Et votre conjoint(e)?
N'hésitez pas à m'écrire en privé pour me parler de vous et de votre réalité!

* * * * *

Sources

Livre
  • Bermingham, S. (2011).  Vivre avec l'infertilité.  Lorsque l'enfant ne parait pas.  Bayard Canada Livres.  Montréal.

Articles
  • Brennan D. P. et al. (2007) Anxiety and sexual stress in men and women undergoing infertility treatment. Fertility and Sterility.  Vol. 88.  No 4.
  • Coëffin-Driol, C. et A. Giami.  (2004) L'impact de l'infertilité et de ses traitements sur la vie sexuelle et la relation de couple : revue de la littérature.  Gynécologie, Obstétrique et Fertilité.  No 32.
  • Collier, F. (2010)  When a couple wants a baby : What are the consequences on their sexuality?  Sexologies.  No 19.
  • Jaoul, M. (2011) L'échec de procréation : ses conséquences sur le sujet et dans le couple : prise en charge des couples en AMP.  Séminaire COCHIN.
  • Letombe, M. et B. Lachowsky (2008)  Répercussion psycho-sexuelles de l'infertilité et de sa prise en charge.  Extrait des mises à jour en gynécologie médicale.  Vol. 8
  • Pirard, C. (2010) Désir d'enfant, désir sexuel : quand infertilité et sexualité se bousculent.  Louvain Med. Vol. 129.  No 9.
  • Salama, S. et al. (2012) Sexualité et infertilité.  Gynécologie, Obstétrique et Fertilité.  No 40.
  • Schmidt, L. et al. (2005) Does infertility cause marital benefit?  An epidemiological study of 2250 women and men in fertility treatement.  Patient Education and Counseling.  No 59.
  • Wright, J. et al. (1990) Le profil psychosocial de couples consultant à une clinique de fertilité. Santé mentale au Québec.  Vol. 15, No 2.


5 commentaires:

  1. L'homme et moi sommes un cas un peu appart. Pendant deux ans et demi nous avons essayé d'avoir un enfant naturellement mais la fécondation n'a jamais été une obsession. Je ne faisait pas de courbes de températures, je n'ai presque pas fait de tests d'ovulations donc notre sexualité n'a pas été trop affectée (en plus j'ai la libido qui grimpe en flèche pendant l'ovulation donc pas de sentiment de corvée).
    Ensuite, il y a eu le cancer et l'annonce de la stérilité de l'homme et nous avons compris qu'on avait autant de chance de concevoir un enfant naturellement que de nous transfert en poireaux. Je n'ai pas l'impression que son infertilité ait fait douté l'homme sur sa virilité (il me l'a confirmé). Il est très à l'aise avec ça. Bref,on s'en sort pas mal. Si une chose qui est vrai, pendant nos essais naturels, certains préliminaires passaient à l'as en période d'ovulation parce qu'il fallait que toutes les ressources de monsieur aille là où elles sont le plus utiles. Pas de perte de sperme.

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    1. C'est très intéressant ce que tu me racontes. Votre parcours est quelque peu différent et c'est possiblement l'une des raisons qui font que l'infertilité a un impact différent à ce niveau. Quoique, ce n'est pas tout le monde qui le vie ainsi!

      Je dois dire que nous aussi, pendant les 2 premières années, on a pas fait de courbe ou utilisé de test d'ovu. Et franchement, je ne regrette rien! On a laissé allé les choses! C'est après que ça c'est compliqué...

      Merci pour ton témoignage!

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  2. Pour réagir en écho à la fille et toi, ici c'est l'inverse. Je suis partie au 1/4 de tour. Je savais avant de commencer même les essais les soucis que nous allions avoir (mais ne me doutais pas qu'on irait "vraiment" en pma). Alors je suis partie direct (au 2ème mois après l'arret de la pilule) en mode température... Lui a eu du mal à suivre... et ne "pensai pas que ce serait aussi grâve" (bref, ne pensais pas que quelques mois plus tard, on serait "légitime" pour être pris en pma). Alors la libido a commencé à décroitre avant les examens au final, car le mode procréation vs récréation était d'ores et déjà activé chez moi. Et au final, le passage en iac et un "ouf"... de prise en charge de ce que je ne suis pas capable de faire (oui, je le prends encore comme ça, mais je travaille dessus). J'espère et ose croire que la libido reviendra avec les iac... même si je crains que l'utro, les douleurs, l'angoisse... prennent le dessus... On verra bien...

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    1. Pas facile les traitements, les attentes, les idées...
      Ici aussi on se doutait qu'on pourrait avoir des soucis de fertilité... Mais on a joué à l'autruche. Ma généraliste, qui ne voyait pas l'utilité de nous diriger en clinique de fertilité avant 2 ans d'essais, a peut-être aussi contribué à notre innocence ou inconscience.
      Je te souhaite que les iac t'aide à lâcher-prise... mais c'est pas gagné... malheureusement!
      Au moins, tu sais que c'est normal... Ça t'aidera peut-être à ne pas culpabiliser :)

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  3. Ici l'infertilité a fini par affecter nos relations, même si on n'en faisait pas une obsession.

    Tout d'abord je devais constamment initialiser les rapports, en période d'ovulation. Mon conjoint travaille énormément, et ce n'était pas rare qu'on doive "passer à l'acte" vers les 22h30, 23h, les soirs de semaine. À cette heure-là, tout ce dont j'ai envie, c'est de me coller au lit avec un bon livre, alors faire tout le cinéma de m'habiller pour encourager monsieur... D'autant plus qu'il n'était pas rare que je reçoive un "Oh non, pas encore!" pour mes efforts.

    On a eu la chance que je tombe enceinte après 2 ans d'essais, et c'est arrivé alors qu'on n'essayait même pas! (Vacances de Noël chez mes parents, soupers arrosés et plein air en masse). Après 3 IAC ratées et beaucoup d'accumulation de tristesse mensuelle, ce fut une belle surprise.

    Je crois que cet épisode a toutefois eu des répercussions sur notre vie sexuelle. Post-bébé, j'ai rarement de libido et maintenant monsieur se plaint d'être celui qui doit toujours initialiser, ou presque; auparavant c'était plutôt 70-30 de mon côté. Je ne saurais dire si c'est en raison de l'infertilité ou si c'est simplement les hormones liées à l'allaitement (j'allaite encore mon bambin de 18 mois). J'ai toujours plaisir lors de nos relations, mais les entâmer me semble toujours être une sollicitation indue de mes énergies...

    J'espère que le tout se replacera lorsque mes hormones reviendront à la vraie normale.

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